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TRIBUNE:  » Assurer la sécurité alimentaire des populations  » parmi les signataires : Delphine Batho, Julien Bayou, Jean-Marc Governatori, Jean-Paul Jaud, Corinne Lepage, Edgar Morin, Michèle Rivasi, Gilles-Eric Séralini, Coline Serreau …

LA CRISE ALIMENTAIRE EST IMMINENTE, car à la détérioration continue des sols s’ajoute le blocage des circuits internationaux de transport sur lesquels repose le système alimentaire mondial. Nous ne sommes pas mieux préparés à cette échéance qu’à l’actuelle crise sanitaire. Or ces épidémies et ces crises alimentaires seront rendues plus fréquentes par l’état écologique et économique du monde.

La menace de pénurie alimentaire n’est ni un coup du sort, ni une fatalité. Elle résulte d’une insouciance et d’une illusion trop longtemps entretenues selon lesquelles nous serions dans un progrès matériel indéfini, dans une abondance qui pourrait — grâce au marché — résoudre spontanément toutes les difficultés et atténuer tous les risques, laissant le consommateur dormir tranquille et vaquer à ses occupations. Nous en avons perdu de vue des principes biologiques de base.

Résultat de ce choix de société : une agriculture artificielle, industrielle, entièrement dépendante des énergies fossiles, hors-sol, sans paysans, anéantie par un exode rural sans précédent. En France, 11 millions de paysans sont passés à la trappe en quelques décennies, et en 2020, c’est encore une exploitation toutes les 26 minutes qui disparaît ! Combien dans le monde ? Ce sont des milliers de kilomètres carrés alignés pour produire, transformer et acheminer une nourriture appauvrie en nutriments, reposant sur trop peu d’espèces, sur des pratiques artificielles et destructrices des sols, des eaux, et des communautés humaines. Ce système alimentaire, trompeusement efficace, n’en est devenu que plus vulnérable aux chocs climatiques, aux maladies, aux crises économiques et géopolitiques, et aux pénuries de ressources.

La France a la réputation d’être un pays producteur. Certes, en volumes ! Mais peut-elle pour autant nourrir sa population ? Non : notre système alimentaire dépend d’importations de soja américain et brésilien (faute de protéines végétales cultivées), de matières premières (dont les énergies fossiles et les phosphates), et de fruits et légumes (des milliers de camions par jour nous apportent les denrées agricoles des pays du sud). Aujourd’hui, moins de 2 % de notre surface agricole utile produit des fruits et légumes, alors qu’il en faudrait 10 % !

Notre monde vit dans un rêve technologique. Mais le réveil est terrible. Il produit maintenant des foules sans travail et sans nourriture décente, sur des sols progressivement stérilisés par les labours profonds et les molécules toxiques de l’agro-industrie suspectées de contribuer à toutes nos maladies chroniques, dites « maladies de civilisation » ! Une agriculture sans paysans, c’est l’Eldorado pour la pétrochimie et l’industrie lourde, mais c’est le cauchemar pour les peuples et les biens communs.

La crise du coronavirus en annonce d’autres, et met en lumière toutes les vulnérabilités extravagantes de ce système industriel. Nous avons l’opportunité de réagir, non pas en stoppant la machine (ça c’est fait), mais en coordonnant et en accélérant une « transition » vers des systèmes alimentaires moins vulnérables et plus résilients aux chocs de toutes sortes. Presque aucun pays n’est épargné par ces menaces, puisque quasi tous ont choisi les mêmes voies techno-chimiques et économiques, les mêmes dépendances des transports au long cours.

Nous sommes nombreux à avoir annoncé les catastrophes alimentaires. Depuis la révolution industrielle des années 1960-1970, des mises en garde ont été documentées, des propositions de réorientation ont été faites, alors que les politiques agricoles, sous l’emprise des lobbies agro-industriels, n’ont cessé de poursuivre leur course folle dévastatrice des écosystèmes, de la santé et des emplois…

Ce que nous proposons, c’est d’ENGAGER D’URGENCE UNE GRANDE CONCERTATION CITOYENNE par échanges électroniques et visio-conférences, dans chaque région et chaque bassin de vie, visant à remailler le territoire avec des productions diversifiées, à proximité et au service des populations, et avec leur aide.

Nous avons besoin :

d’hectares soustraits à l’artificialisation et à l’appétit des acquéreurs fonciers ;
de formation des agriculteurs aux techniques simples de culture et d’élevage qui permettent de régénérer les sols, économiser l’eau, réduire la mécanisation, et boucler les cycles du carbone, de l’azote et du phosphore ;
d’outils de production agricole robustes et simples à fabriquer ;
de circuits raccourcis qui alimentent les populations et les usines de transformation, si possible locales.
C’est une question de bon sens, pas d’idéologie. Il y a urgence à faire l’inventaire des ressources et des besoins sur les territoires par des concertations régionales en commençant par les communes avec la collaboration des Maires et des associations locales :

Quels sont les lieux et les ressources comestibles disponibles aujourd’hui, les moyens de stockage et de distribution ?
Quels sont les lieux de formation pour les futurs paysans ?
Quelles sont les cultures et les surfaces allouées aux denrées de première nécessité ?
Quelles sont les surfaces à conserver de milieux naturels et d’infrastructures écologiques pour renforcer les populations et la diversité des pollinisateurs et des oiseaux prédateurs des ravageurs ?
Quels sont les moyens humains et matériels à mettre en œuvre dans chaque commune ?

Chaque municipalité ou intercommunalité peut faire l’inventaire de son territoire avec ses citoyens, selon une grille à co-élaborer, afin de cartographier la France, d’échanger et de s’entraider. Il s’agit de rendre les territoires efficients dans chaque région, en s’inspirant des meilleures solutions des uns et des autres.

La nourriture est le premier des besoins, or les systèmes alimentaires sont devenus majoritairement vulnérables et contre-productifs. L’agriculture est l’une des fonctions essentielles à la sécurité et au bien-être des communautés humaines, c’est le moment de lui redonner ses bases et son sens : c’est une question d’ordre public et de sécurité nationale.

Signataires :

Philippe Desbrosses : agriculteur et docteur en sciences de l’environnement
Dominique Bourg : philosophe, professeur honoraire, Université de Lausanne
Valérie Cabanes : juriste internationaliste
Françoise Laborde : sénatrice de la Haute-Garonne
Stéphane Linou : ancien conseiller général de l’Aude, auteur de Résilience alimentaire et sécurité nationale (2019)
Edgar Morin : sociologue
Christian Mouchet : Président de la Fondation pour le Progrès de l’Homme, agronome, professeur émérite Agrocampus Ouest
Coline Serreau : cinéaste, membre de l’académie des Arts
Pablo Servigne : ingénieur agronome et auteur
Julien Bayou : secrétaire national du groupe EELV
Sophie Swaton : Présidente de la Fondation Zoein, économiste et philosophe, Université de Lausanne
Maxence Layet: écrivain, éditeur de la revue Orbs l’autre Planète
Gilles-Eric Séralini : scientifique, professeur d’Université, spécialiste des O.G.M.
Delphine Batho : ancienne Ministre, députée des Deux-Sèvres, auteure de L’ Ecologie Intégrale
Benoît Biteau : paysan bio, agronome, député Européen EEVL
Corinne Lalo : journaliste indépendante d’investigation, auteure
Dr Dominique Eraud : phytothérapeute-nutritionniste, présidente de Solidarité-Homéopathie
Emmanuel Bailly : ingénieur auteur des tables d’indices de Souveraineté Alimentaire
Alexandre Boisson : expert sécurité civile, co-fondateur de SOS maires
Yannick Jadot : député Européen EELV
Jean-Marc Governatori : auteur, Écologie Politique
Corinne Lepage : ancienne ministre et députée Européenne, avocate
Charles et Perrine Hervé-Gruyer : fondateurs de la Ferme du Bec-Hellouin, auteurs Permaculture
Lucile Cornet-Vernet : parodontologue, fondatrice des Maisons de l’ARTÉMISIA
André-Jacques Holbecq : auteur, économiste, co-fondateur de SOS maires
Claude Aubert : agronome, écrivain, fondateur de Terre Vivante et Quatre Saisons du Jardinage
Boris Aubligine : paysan, fondateur d’Ethica Mondo MBA
Charles Kloboukoff : PDG du groupe Léa Nature
Michèle Rivasi : députée Européenne EELV
Samuel Lachaume : conseil en finance et territoire durables
Cyril Dion : co-fondateur du Mouvement des Colibris et co-réalisateur du Film Demain
Lionel Montoliu : fondateur de 0.6 Planet, docteur de Polytechnique, co-directeur du master Management de la Technologie et de l’Innovation
François Plassard : paysan Terre-Mer, ingénieur agronome, docteur en Economie, auteur ruralité
Monica Bassett : artiste peintre Internationale
Isabelle Champion-Poirette : présidente de Mille Variétés Anciennes
Olivier Roellinger : chef restaurateur de Cancale
Jean-Paul Jaud : cinéaste

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« TOXIQUE PLANETE – Le scandale invisible des maladies chroniques » par André CICOLELLA, président du RES (Réseau environnement santé). Réagissons enfin contre l’épidémie de maladies chroniques qui entraine souffrances et morts inutiles !

ToxiquePlanèteCicolella

« Notre monde de plus en plus toxique induit non seulement un développement de l’hermaphrodisme chez les ours blancs et des changements de sexes des poissons, mais il affecte aussi la reproduction humaine : diminution de l’âge de la puberté chez les filles, développement des malformations génitales, baisse de la qualité du sperme… Si l’inquiétante montée de l’incidence du cancer de l’enfant en Europe (+ 1 % par an depuis 30 ans) commence à être connue, on sait moins que les maladies chroniques menacent l’ensemble de la planète : elles sont une véritable bombe à retardement en Inde et en Chine notamment. Aujourd’hui, 63 décès sur 100 dans le monde sont le fait des maladies chroniques (cardiovasculaires, cancers, maladies respiratoires, diabètes, etc.) contre 37 dus aux maladies infectieuses. La mise à jour du caractère toxique de milliers de molécules diffusées depuis 1945, la découverte récente des « perturbateurs endocriniens » et de leurs effets biologiques et sanitaires, la découverte de l’importance de l’imprégnation fœtale sur la descendance génétique (hérédité des influences environnementales acquises, en rupture avec les certitudes de la génétique du XXe siècle) sont autant d’éléments d’une révolution en cours dans la pensée biomédicale, et de la nécessité de nouvelles politiques de santé à l’échelle mondiale. L’OMS qualifiait en 2011 cette épidémie mondiale de maladies chroniques de « catastrophe imminente ». Il est temps de comprendre et d’agir.

André Cicolella est l’auteur notamment de Alertes Santé (Fayard) et de Le Défi des épidémies modernes (La Découverte). Toxicologue, il est conseiller scientifique à l’Institut national de l’Environnement et des Risques (INERIS) et enseignant à l’École des affaires internationales de Sciences Po Paris. Il est cofondateur et président du Réseau environnement santé qui est à l’origine de l’interdiction du bisphénol A dans les biberons et les contenants alimentaires, de l’interdiction du perchloréthylène dans les pressings ou de la prise de conscience des effets de l’aspartame. »

RÉSEAU ENVIRONNEMENT SANTE


Le site : RES

 » Le comité de 7 « hautes personnalités du monde de la santé et de la recherche », nommé par la Ministre de la Santé pour définir un « Projet global pour la Stratégie Nationale de Santé », vient de rendre son rapport. En février 2013, le premier ministre avait fixé l’enjeu en affirmant : « la politique sanitaire ne se résume pas à l’offre de soins… L’état de santé d’une population dépend aussi de la prévention des maladies et de l’éducation à la santé. Or la France ne consacre que 2 % de ses dépenses de santé à la prévention »1.

Le texte, bien qu’intitulé « pour un projet global », n’a pas répondu à cette commande. On cherche en vain dans le constat une indication sur la situation sanitaire de la France. Aucune référence n’est faite à l’épidémie de maladies chroniques si ce n’est au travers de la prise en charge par un parcours de soins coordonné. Le texte débouche sur 19 recommandations et 8 chantiers prioritaires, tous ciblés sur l‘organisation du système de soins. Même le volet recherche ne comprend aucun paragraphe sur les causes des maladies.

Les rédacteurs vivent-ils en vase clos ? N’ont-ils jamais entendu parler de la déclaration de New York voté à l’unanimité par l’Assemblée Générale de l’ONU en septembre 2011 qui affirmait « que le fardeau et la menace que les maladies non transmissibles représentent à l’échelle mondiale constituent l’un des principaux défis pour le développement au XXIe siècle »2 ? Ont-ils suivi l’actualité autour de l’interdiction du bisphénol A et de la Stratégie Nationale sur les Perturbateurs Endocriniens (SNPE) ? Connaissent-ils seulement la déclaration de Paris de Mai 2012 issu du colloque international « Programmation Prénatale et Toxicité » affirmant l’état de la science aujourd’hui :

« Beaucoup des grandes maladies – et des atteintes fonctionnelles – dont la prévalence a augmenté substantiellement au cours des 40 dernières années apparaissent être liées pour partie à des facteurs de développement consécutifs à des déséquilibres nutritionnels ou des expositions environnementales aux substances chimiques : obésité, diabète, hypertension, maladies cardio-vasculaires, asthme et allergies, maladies immunes et auto-immunes, maladies neuro-développementales et neuro-dégénératives, puberté précoce et infertilité, certains types de cancer, ostéoporose, dépression, schizophrénie et sarcopénie »3.

« Il est temps, il est urgent d’agir » avait affirmé le premier ministre en précisant que cette Stratégie Nationale de Santé servirait à préparer la loi de santé publique soumise au Parlement en 2014. Le texte remis à la Ministre de la Santé repose sur une vision dépassée des enjeux de santé. Il ne peut fournir le matériau nécessaire à l’élaboration d’une telle loi.

Il est encore temps de revoir la copie et d’organiser une véritable consultation sur la crise sanitaire et sur les moyens d’y faire face, en agissant sur ses causes et en organisant le soin en conséquence. Cette crise sanitaire fait imploser notre système de santé. Il est temps d’avoir une réflexion globale pour engager la 2ème révolution de santé publique.

1. http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/interventions/02.08_discours_de_jean-marc_ayrault_premier_ministre_-_strategie_nationale_de_sante.pdf
2. http://www.who.int/nmh/events/un_ncd_summit2011/fr/index.html
3. http://www.ehjournal.net/content/pdf/1476-069X-11-42.pdf

RÉSEAU ENVIRONNEMENT SANTE
148 rue faubourg Saint-Denis 75010 Paris
http://www.reseau-environnement-sante.fr